











Je n’y vois plus rien (2025)
Série de photos, loin de tout sur des chemins obscurs sans lune ni lumière.
Quand je m’avance sur ces chemins, il fait nuit noire, je ne vois rien, juste la trace du sol et parfois la découpe du ciel. Je cherche les endroits les plus sombres. La moindre lueur de vie humaine, d’une maison habitée ou même d’une agglomération lointaine est trop violente pour le capteur numérique de mon appareil photo, la lune tout autant, quand bien même elle ne serait qu’un croissant. Parfois j’ai peur sur ces chemins obscurs. J’ai bien une lampe de poche sur moi mais je ne peux pas m’en servir. Si je l’allume, le paysage redevient quelconque, banal, ennuyeux, puis je m’abîme les yeux et j’y vois encore moins. Alors j’avance dans le noir, m’abandonnant à l’obscurité de ces chemins que je connais par cœur et je me laisse porter par l’imaginaire qui s’ouvre à moi.
Je cadre à l’instinct, sans voir précisément ce que je cadre. Je devine ce que l’appareil enregistre mais impossible d’apprécier le résultat, l’image qui s’affiche est noire. C’est seulement lorsque je reviens chez moi, pendant le développement, que le résultat se révèle.
Chaque image est différente, chacune a son interprétation de la lumière, ses aberrations, c’est une surprise et j’ai parfois l’impression de revenir plus d’un siècle en arrière, surpris par un procédé chimique capricieux. Je retrouve des impressions de peintres que j’aime, Fauves, Nabis, je me souviens des chemins peints par De Staël, je les cherche dans ces images rêvées que j’aurais aimé peindre.
Blind To The Night (2025)
Series of photographs, far from everything, on dark paths without moonlight or illumination.
When I walk these paths, the night is pitch black—I see nothing, just the trace of the ground and, at times, the silhouette of the sky. I seek out the darkest places. The slightest glimmer of human life, the faint glow of an inhabited house, or even the distant haze of a city is too harsh for my camera’s digital sensor. Even the moon, no matter how thin its crescent, is too much. Sometimes, I feel fear on these shadowed trails. I do carry a flashlight, but I cannot use it. If I turn it on, the landscape becomes ordinary, dull, unremarkable. My eyes adjust, and I see even less. So I move forward in the dark, surrendering to the darkness of these paths I know by heart, letting my imagination unfold before me.
I frame instinctively, without precisely seeing what I capture. I sense what the camera records, but it’s impossible to assess the result—the image on the screen is black. Only when I return home, during development, does the outcome reveal itself.
Each image is unique, each interprets light in its own way, with its own distortions. It’s always a surprise, and at times, I feel as if I’ve stepped back over a century, as though caught off guard by an unpredictable chemical process. I rediscover echoes of the painters I love—the Fauves, the Nabis. I recall the paths painted by Nicolas de Staël, searching for them in these dreamlike images I wish I had painted myself.